Dimanche 17 juin, 23h15, on se retrouve avec Yom à l'angle des rues D. et V.
En plus de la motivation des cataphiles en manque, nous disposons d'un équipement redoutable pour inaugurer ce qui devrait être notre
première ouverture de plaque ! Yom étrenne un pied de biche acheté récemment, bien camouflé dans un sac BHV qui dépasse de 40 cm
de son sac-à-dos. Pour ma part, j'ai un baudrier et 2 sangles avec un mousqueton attaché à chacune. Autant d'équipement, ça rassure
toujours, parce que nous devons avouer que l'on appréhende pas mal l'ouverture de la plaque. J'ai lu sur le net que ça pesait 120kg et
j'ai un peu peur pour nos lombaires.
On arrive devant la plaque P., Yom glisse le pied de biche sous la plaque et la soulève facilement pendant que je la tire vers
moi avec la sangle dont le mousqueton est bloqué dans l'oeilleton de la plaque. En 15 secondes, nous sommes à l'intérieur !
Reste à refermer la plaque d'en-dessous. C'est Yom qui s'y colle non sans mal : il s'époumonne comme un taureau mais y arrive finalement
très rapidement, même si ça semble lui avoir bouffé pas mal d'énergie instantanée ! Nous empruntons notre première galerie dans l'euphorie du succès total
et diligent de notre entrée. On est fous de joie.
Après avoir parcouru des galeries un peu moins dégradées que sur les
"autoroutes du sud", nous faisons quelques photos du célébrissime pilier couché et nous arrivons ansuite au réseau à double-étage autour du rond-point octogonal et du carrefour des morts. C'est la première fois
que je vois des ossements dans les carrières et ça fait quelque chose...de pas très agréable finalement, en ce qui me concerne.
On poursuit jusqu'au bar des rats pour une première pause où nous trouvons un tract d'invitation à une teuf souterraine dans deux semaines.
En repartant vers le bunker, mon ouie d'homme qui valait 100 cyalumes entend le bruit discret d'une horde de cataphiles hurlants qui
arrivent vers nous. Nous nous scrutons tous les deux avec Yom pour savoir si on les attaque au pied de biche ou au couteau. Finalement, plein de mansuétude, nous faisons demi-tour à grande vitesse histoire de continuer à passer une soirée peinards, à défaut d'être courageuse*. Yom taille la route en trouvant illico un
itinéraire bis pour arriver au bunker, et sans regarder le plan svp ! Yom, il entend rien mais il a un sacré sens de l'orientation...
Après avoir fait ce joli détour, nous éteignons nos lampes et nous arrivons derrière la même horde de cataphiles que l'on aperçoit au fond d'une galerie en train de s'éloigner...
Nous rentrons dans le bunker, le genre de salle que je n'apprécie pas particulièrement tellement elle rappelle l'angoisse de la guerre et de la survie. En revanche, l'arrivée dans la fontaine des Chartreux est un émerveillement : architecture superbe, illumination valable, photos et repos bien mérités.
On repart pour aller vers Saint-Michel mais il semble que nos pas réveillent quelqu'un dans l'Anschluss. Nous entendons tousser et râler...sans doute Rahan ? Respectueux du sommeil des cataphiles mythiques, nous faisons demi-tour, direction la sortie, en faisant quelques crochets par l'abri FACO et le sous-sol d'Assas, parties assez peu rassurantes pour les gaucho-pacifistes que nous sommes...
Retour sous la plaque de sortie à 6h. Yom étant un peu fatigué physiquement, j'enfile mon baudrier (sans penser que cela me sera utile) et attaque la montée aux échelons. Arrivé sous la plaque, je pousse la plaque du casque et des épaules mais avec le même résultat qu'un coup de pied dans la porte d'un abri anti-atomique. Je m'accroche donc au dernier échelon sous la plaque avec une sangle courte, me retourne, dos dans le vide et pousse la plaque avec les pieds. C'est plus dur que je ne pensais ! Au bout de 2 minutes, de rage et d'épuisement, je jette mes dernières forces dans un violent coup de latte salvateur qui ouvre grand le puit à la lumière du jour.
* "Au moindre buit de pas, on peut courir se cacher parce que, sans très bien savoir pourquoi, on redoute la rencontre. Pourtant, elle pourra être le "clou" de la sortie ! Paradoxe des rencontres souterraines où l'autre est redouté, quelquefois méprisé, et secrètement attendu..." (La Cité des cataphiles, Ed. ACP, p.72)